LOURDES - 1858
RECIT DES APPARITIONS
Notre-Dame est apparue à Lourdes dix-huit fois à Bernadette
Soubirous du 11 février au 16 juillet 1858.
1ère apparition
Litanies à Notre-Dame de Lourdes
Cantiques à Notre-Dame de Lourdes
Première apparition, le Jeudi 11 février
1858
C'était le jeudi gras. Il faisait bien froid. Vers 11 heures, Bernadette
Soubirous, sa soeur Marie-Antoinette et une amie, Jeanne Abadie, se
dirigèrent vers les bords du Gave du côté de la grotte
de Massabielle pour chercher du bois. Pendant que Toinette et Jeanne
s'éloignaient de Bernadette, celle-ci avant de passer l'eau glaciale
du canal se mit à genoux pour réciter l'Angélus qu'on
venait de sonner. Et elle aura le bonheur de voir Celle qu'elle aimait saluer
à l'heure de l'Angélus. Laissons parler Bernadette elle-même:
"J'avais commencé à ôter mon premier bas, quand tout
à coup j'entendis une grande rumeur pareille à un bruit d'orage.
Je regardai à droite, à gauche, sur les arbres de la rivière.
Rien ne bougeait; je crus m'être trompée. Je continuai à
me déchausser, lorsqu'une nouvelle rumeur, semblable à la
première, se fit encore entendre. Oh! alors, j'eus peur et me dressai.
Je n'avais plus de parole et ne savais que penser, quand, tournant la tête
du côté de la Grotte, je vis à une des ouvertures du
rocher un buisson, un seul, remuer, comme s'il avait fait grand vent. Presque
en même temps il sortit de l'intérieur de la Grotte un nuage
couleur d'or, et peu après une Dame jeune et belle, belle surtout,
comme Je n'en avais jamais vu, vint se placer à l'entrée de
l'ouverture au-dessus du buisson. Aussitôt elle me regarda, me sourit
et me fit signe d'avancer, comme si elle avait été ma mère.
La peur m'avait passé, mais il me semblait que je ne savais plus où
j'étais. Je me frottais les yeux, je les fermais, je les ouvrais,
mais la Dame était toujours là, continuant à me sourire
et me faisant comprendre que je ne me trompais pas. Sans me rendre compte
de ce que je faisais, je pris mon chapelet dans ma poche et me mis à
genoux. La Dame m'approuva par un signe de tête et amena elle-même
dans ses doigts un chapelet qu'elle, tenait à son bras droit. Lorsque
je voulus commencer le chapelet et porter ma main au front, mon bras demeura
comme paralysé, et ce n'est qu'après que la Dame se fut
signée que je pus faire comme elle. La Dame me laissa prier toute
seule; elle faisait bien passer entre ses doigts les grains de son chapelet,
mais elle ne parlait pas; et ce n'est qu'à la fin de chaque dizaine
qu'elle disait avec moi: Gloria Patri, et Filio, et Spiritui Sancto. Quand
j'eus fini de réciter mon chapelet, la Dame me fit signe d'approcher.
Mais je n'ai pas osé. Alors elle rentra à l'intérieur
de la roche et le nuage disparut avec elle. "La Dame avait l'air d'une jeune
fille de seize à dix-sept ans, aux yeux bleus. Elle était
vêtue d'une robe blanche, serrée à la ceinture par un
ruban bleu glissant le long de la robe. Elle portait sur sa tête un
voile blanc, laissant à peine apercevoir ses cheveux, retombant ensuite
en arrière jusqu'au dessous de la taille. Ses pieds étaient
nus, mais couverts par les derniers plis de la robe sauf à la pointe
où brillait sur chacun d'eux une rose jaune, épanouie. Les
grains de son chapelet étaient blancs et la chaîne d'or brillante
comme les deux roses des pieds. Je n'en ai jamais vu de semblable, ça
brillait comme de l'or et bien plus encore."
Deuxième apparition: le Dimanche 14 février
1858
C'était le dimanche de la Quinquagésime et des Quarante-Heures.
Voici Bernadette qui, après la grand-messe, descend avec onze ou douze
jeunes filles à la Grotte, emportant une bouteille d'eau bénite
au cas où l'apparition serait celle d'un mauvais esprit. Elles
s'agenouillent et récitent le chapelet. Bientôt la voyante
s'écrie avec émotion: "Elle y est! Elle y est! La voilà!"
Et Bernadette de se lever, de jeter avec hâte de l'eau bénite
dans la direction du rosier en disant: "Si vous venez de la part de Dieu,
approchez..." Le beau sourire de l'Apparition tranquillise totalement l'âme
de Bernadette qui se tourne vers ses compagnes en disant: "Elle ne s'en
fâche pas, au contraire, elle approuve de la tête et sourit vers
nous toutes. Plus je lui en jette, plus elle sourit." Et au nom sacré
de Dieu le visage de Marie s'illumina merveilleusement. A ce nom Elle s'inclina
à plusieurs reprises. A ce nom Elle s'avança jusque sur le
bord du rocher. Et devant l'Apparition qui resplendit d'une beauté
céleste et qui est si près d'elle, Bernadette se prosterne
et dit instinctivement ses Ave Maria en récitant le chapelet. Et
bientôt elle ne voit que Marie. Elle est dans l'extase qui durera une
heure. "Elle semblait un ange", dit Jeanne Abadie qui était parmi
les jeunes filles, "nous la croyions morte, nous la regardions et nous pleurions
toutes". Et un autre témoin, Antoine Nicolau, dira: "Bernadette
était à genoux, blême, les yeux très ouverts,
fixés vers la niche, les mains jointes, le chapelet entre les doigts;
les larmes coulaient des deux yeux; elle souriait et avait un visage plus
beau que tous ceux que j'ai vus."
Troisième apparition: le Jeudi 18 février
1858
Après avoir assisté à la messe, Bernadette descend à
la Grotte vers 7 heures. Elle est accompagnée de Mme Millet et de
Mlle Peyret. Elle a le bonheur de voir la Dame pendant environ une heure.
Mais c'est la première fois qu'elle entendra la voix de l'Immaculée.
"Va demander à la Dame ce qu'elle veut et qu'elle le mette par
écrit", avait dit Antoinette Peyret à Bernadette, en lui donnant
un papier, une plume et de l'encre. Bernadette obéit. La Dame va dire
en effet ce qu'Elle veut. Elle a souri et répondu: "Ce que j'ai à
vous dire, il n'est pas besoin que je le mette par écrit." Après
s'être recueillie, l'Apparition demanda: "Voulez-vous avoir la bonté
de venir ici pendant quinze jours?" Bernadette n'en reviendra pas de cette
politesse de la Dame à l'égard de la pauvre fille qu'elle
était. Elle nous raconte: "Elle m'a dit: vous. Elle m'a dit d'avoir
la bonté de venir! " Aussi la réponse de Bernadette fut-elle
prompte, joyeuse et confiante: "Eh! oui, Madame, je vous le promets... si
mes parents le permettent." Et cette promesse de Bernadette lui vaut la promesse
merveilleuse de Marie: "Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en
ce monde, mais dans l'autre." A l'adresse de nous tous la Dame ajoute cette
invitation si discrète: "Je désire y voir du monde. " Et Bernadette
pourrait nous dire ce qu'elle disait à Antoinette Peyret: "Elle te
regarde en ce moment."
Quatrième apparition: le Vendredi 19 février
1858 - 2e jour de la quinzaine
Après la messe, vers 7 heures, nous voyons Bernadette, sa maman, sa
tante Bernarde Castérot, Mme Millet et quelques autres femmes à
la Grotte. Bernadette fait son beau signe de croix, qu'elle a vu faire à
la Dame, et récite son chapelet. Les témoins la voient dès
le troisième Ave "ravie" pendant environ une demi-heure. Ils admirent
"les ondées de joie" qui passent sur sa face, "les sourires qui illuminent
son visage". La mère voyant sa fille transfigurée s'écrie:
"Oh! mon Dieu, je vous en conjure, ne me l'enlevez pas." "Oh! qu'elle est
belle!", entend-on dire. Et qu'a dit Marie ? Cela semble être si peu
et pourtant c'est si important dans la formation d'une âme. "Elle m'a
remerciée d'être venue." La Reine et Mère qui dit "merci"!
"Elle m'a, dit que plus tard elle aurait des révélations à
me faire." Il fallait préparer Bernadette à une plus grande
intimité. Tandis que les hommes ne constatent que bien tard l'importance
de ce qui vient d'en haut, l'enfer le devine bien plus tôt. Bernadette
révélera ceci: "Pendant que je priais, des voix m'ont
appelée, on aurait dit mille personnes en colère. C'était
horrible. La voix la plus forte a crié: "Sauve-toi! Sauve-toi!" Mais
la Dame a regardé vers le Gave en fronçant les sourcils et
les voix se sont évanouies."
Cinquième apparition: le Samedi 20 février
1858 - 3e jour de la quinzaine
Avec sa mère, sa tante Basile, Bernadette descend tout de suite
après la messe vers la Grotte. Il y a cette fois une trentaine de
témoins. "Le matin de la cinquième apparition, Bernadette arriva
à Massabielle vers 6 heures 30. Elle ne fut ni étonnée
ni émue d'y trouver la foule qui l'y attendait. Elle se présenta
avec le même air que si elle eût été simple spectatrice
et elle alla s'agenouiller à sa place ordinaire. Sans faire attention
aux yeux fixés sur elle, elle prit naturellement son chapelet et se
mit à prier."
Sixième apparition: le Dimanche 21 février
1858 - 4e jour de la quinzaine
En ce premier dimanche de Carême 1858, vers 6 heures du matin, les
abords de la Grotte se remplissent de centaines de témoins. Parmi
eux se trouve un médecin. Le Dr Dozous, qui observe de près
l'état de Bernadette pendant une demi-heure d'extase, ne peut
détecter aucune "surexcitation nerveuse". Ce médecin nous raconte:
"Bernadette, après que j'eus abandonné son bras, s'avança
un peu vers le haut de la Grotte; bientôt, je vis son visage, qui
jusque-là avait offert l'expression de la béatitude la plus
parfaite, s'attrister; deux larmes tombèrent de ses yeux et
roulèrent sur ses joues. Ces changements survenus dans sa physionomie
pendant cette station me surprirent. Je lui demandai, quand elle eut
terminé ses prières et que l'être mystérieux eut
disparu, ce qui s'était passé en elle durant cette longue station;
elle me répondit: "La Dame, en me quittant un instant de son regard,
le dirigea au loin par-dessus ma tête; ensuite le reportant sur moi,
qui lui avais demandé ce qui l'attristait, elle me dit: Priez pour
les pauvres pécheurs, pour le monde si agité. Je fus bien vite
rassurée par l'expression de bonté et de sérénité
que je pus revoir sur son visage, et aussitôt elle disparut." Voilà
la grande intention de Marie en ce premier dimanche de Carême: prier
et faire prier pour les pécheurs. Mais il faudra aussi souffrir. Ce
même jour Bernadette doit comparaître devant deux autorités
civiles et subir leurs interrogatoires. La journée finit dans une
grande souffrance, le père défend à Bernadette d'aller
dorénavant à la Grotte.
Pas d'apparition : le Lundi 22 février 1858 - 5e jour de la
quinzaine
Vers 8 heures 30, Bernadette est attirée à la Grotte. Elle
récite son chapelet devant de nombreuses personnes, elle prie longuement,
mais elle se relève en confessant n'avoir rien vu. Elle rentre toute
désolée, en pleurs. Elle explique à ses parents "qu'une
barrière invisible l'empêchait de passer" devant le chemin allant
à la Grotte et qu'une force irrésistible l'avait emmenée
à la Grotte. Croyant avoir déplu à la Dame, Bernadette
ne cessera de pleurer toute la soirée, appuyée contre le lit.
Devant cette sincère et poignante douleur le père leva sa
défense. Ainsi en n'apparaissant pas la Vierge très prudente
a obtenu de merveilleux effets: la souffrance très pure de Bernadette
pour rendre fécondes ses Apparitions, la levée de la défense
paternelle, soulignant ainsi le respect dû aux ordres parentaux.
Septième apparition: le Mardi 23 février
1858 - 6e jour de la quinzaine
Malgré la déception du 22 février 150 à 200 personnes
se rendent à la Grotte déjà vers 6 heures. Beaucoup
y attendent Bernadette en priant à genoux. Il y a quelques messieurs
ne croyant pas encore à la réalité des apparitions.
Ils explorent la Grotte, son intérieur, ses alentours, mais ils ne
découvrent rien de suspect. Parmi eux le médecin M. Dozous
et M. Estrade, témoin fidèle et historien des
événements de Lourdes. Bernadette arrive accompagnée
de sa mère et de ses tantes Bernarde et Basile. Elle entre en extase
dès les premiers Ave et y reste pendant une heure. Pour pré-
munir Bernadette qui sera de plus en plus en butte aux contradictions des
uns, et, ce qui était bien plus dangereux pour elle, à l'adoration
des autres, la Dame la laisse entrer dans son intimité. Elle lui confie
en ce jour trois secrets. Cette intimité rivera Bernadette
étroitement à Elle, la séparera des autres, lui apprendra
à rester fidèle à sa mission. Trois ans après
ce jour Bernadette pourra dire: "La Dame m'a défendu de les dire à
personne: j'ai été fidèle jusqu'à présent."
Elle le fut jusqu'au bout. Elle a emporté ses secrets dans
l'éternité.
Huitième apparition: le Mercredi 24 février
1858 - 7e jour de la quinzaine
"La voyante, nous dit M. Estrade, peu de temps après être
entrée en extase, s'était mise à écouter du
côté du rocher, puis, comme quelqu'un qui apprend une douloureuse
nouvelle, elle avait laissé tomber ses bras, et des larmes abondantes
coulaient sur se joues. Dans une attitude humiliée, elle avait gravi
à genoux la pente qui précédait la niche en collant
à chaque pas ses lèvres contre terre." D'après les
témoignages il faut conclure que la Dame s'est montrée d'abord
sur l'églantier comme d'ordinaire, qu'Elle a disparu ensuite, que
la voyante l'a recherchée "sous la voûte de la Grotte" et qu'elle
l'a retrouvée. C'est alors qu'elle se retourne vers la foule de 400
à 500 personnes. Son visage est en pleurs. La voix étranglée
de sanglots Bernadette doit passer à la foule le message de
l'Immaculée: "Pénitence, Pénitence, Pénitence!"
Neuvième apparition: le Jeudi 25 février
1858 - 8e jour de la quinzaine
L'Immaculée en ce jour du 25 février a voulu que Bernadette
s'humilie profondément. Elle lui a donné des ordres apparemment
incompréhensibles et déraisonnables. Cette humilité
et cette obéissance feront jaillir ce que le monde appelle volontiers
la Source Miraculeuse de Lourdes. La foule de 400 personnes voit Bernadette
s'avancer sur ses genoux jusqu'au fond de la Grotte, puis redescendre sur
la pente, se diriger vers la rive du Gave, s'arrêter subitement, revenir
dans la Grotte, et là comme écouter quelqu'un dont elle semble
ne pas comprendre les ordres. On la voit ensuite gratter la terre, boire
d'une eau trouble qui en sort, s'en laver pour montrer en public une figure
toute barbouillée de boue. On la voit enfin manger de l'herbe. Tandis
que Bernadette voit sourire la Dame, la foule pense que la voyante n'est
qu'une déséquilibrée, une folle. Bernadette a expliqué
elle-même plus tard cette scène qui avait déçu
tout le monde: "Pendant que j'étais en prière, la Dame m'a
dit d'une manière amicale, mais en même temps sérieuse:
Allez boire à la fontaine et vous y laver: Comme je ne savais pas
où était cette fontaine et que je croyais que cela n'y faisait
rien, je me suis dirigée vers le Gave. La Dame m'a rappelée
et m'a fait signe du doigt de me rendre sous la Grotte à gauche; j'ai
obéi, mais je ne voyais pas d'eau. Ne sachant où en prendre
j'ai gratté la terre et il en est arrivé. Je l'ai laissée
s'éclaircir un peu, puis j'ai bu et je me suis lavée."
Interrogée pourquoi elle avait mangé de l'herbe, Bernadette
répondit: "La Dame m'y a poussée par un mouvement intérieur."
Il semble que Bernadette pendant cette vision de trois quarts d 'heure n'a
pas eu de transfiguration.
Pas d'apparition: le Vendredi 26 février 1858 - 9e jour de
la quinzaine
Bernadette a affirmé plus tard qu'elle avait été
privée de l'Apparition deux fois au cours de la quinzaine, un lundi
et un vendredi, donc le lundi 22 et le vendredi 26 février. Pourquoi
la Vierge n'a-t-elle pas paru? Elle veut, semble-t-il, attirer l'attention
de la foule vers cette source qui va devenir le témoignage permanent
de son Apparition, le signe de sa présence comme médiatrice
de grâces. Et les larmes que Bernadette a versées tout le long
du chemin de la Grotte jusqu'au Cachot féconderont ces eaux.
Dixième apparition: le Samedi 27 février
1858 - 10e jour de la quinzaine
Une "masse compacte" de 800 à 900 personnes attend Bernadette qui
arrive vers 6 heures et demie à la Grotte. Pendant un quart d'heure
Bernadette marche sur les genoux et baise la terre à plusieurs reprises.
"La Dame m'avait dit: Allez baiser la terre par pénitence pour les
pécheurs. " La Sainte Vierge aurait ajouté: "...si cela ne
doit pas vous coûter trop de répugnance ni de fatigue." Par
deux fois Bernadette commande par geste à la foule d'en faire autant.
La deuxième fois celle-ci obéit. Depuis ce jour le sol et la
pierre sacrée de Massabielle se couvrent des baisers du monde. Ce
jour-là encore la Dame donne à la voyante ce message: "Allez
dire aux prêtres de faire bâtir ici une chapelle. "
Onzième apparition: le Dimanche 28 février
1858 - 11e jour de la quinzaine
En dépit d'une pluie fine et constante, d'un froid terrible, un ou
deux milliers de personnes se trouvent à la Grotte dès les
premières heures. Bernadette arrive à 7 heures. Lorsqu'elle
se met à genoux, récite son chapelet et baise la terre, un
souffle puissant semble passer sur l'assistance. Tous les spectateurs
s'agenouillent ou s'efforcent de le faire, ils prient et ceux qui le peuvent
baisent la terre avec Bernadette. La Dame fait à Bernadette quelques
communications intimes dont personne n'a jamais rien su, des communications
qui devaient préparer et fortifier Bernadette en face des tribulations
à venir. Déjà ce même dimanche, après la
grand-messe, Bernadette devra subir l'interrogatoire du juge d'instruction
Rives. Il la menacera même de prison.
Douzième apparition: le Lundi 1er mars - 12e
jour de la quinzaine
Pour la première fois le père de Bernadette l'accompagne à
la Grotte, où 2600 personnes l'attendent de bonne heure. Elles
éprouveront le bonheur de vivre pendant trois quarts d'heure en
présence de cette Apparition céleste dont la beauté
se reflète sur le visage de Bernadette. En ce jour, la Dame a donné
à Bernadette et à toute la foule une leçon inoubliable:
celle d'aimer son chapelet, si pauvre soit-il, et de le porter toujours avec
soi. La voyante s'étant servie du chapelet d'une autre personne, la
Dame lui demanda: "Qu'est devenu votre chapelet?" Bernadette tira le sien
de sa poche et le montra à la Dame. Et la Vierge en souriant ajouta:
"Servez-vous de celui-là. "
Treizième apparition Mardi 2 mars - 13e jour
de la quinzaine
Ce matin, à l'heure ordinaire, Bernadette n'a qu'une brève
vision de la Dame. Environ 3000 personnes ont le bonheur d'y assister. La
Dame avait renouvelé son message du 27 février: "Vous irez
dire aux prêtres de faire bâtir ici une chapelle." Elle aurait
ajouté cette fois: "au plus court, quand même elle serait toute
petite, et d'y venir en procession." Bernadette, une ou deux fois
déjà fort mal reçue par M. le Curé, trouvera
le courage d'aller le trouver deux fois ce même jour, le matin et le
soir. Elle fait cette démarche pénible parce qu'elle aime la
Dame. A celui qui aime tout est possible. Celui qui aime, dira Bernadette,
fait tout sans peine ou bien sa peine, il l'aime.
Quatorzième apparition: le Mercredi 3 mars 1858
- 14e jour de la quinzaine
D'après le commissaire de police, 4000 personnes attendent ce matin
la voyante qui arriva vers 6 heures 45. Bernadette prie longuement. Mais
elle se relève, les yeux pleins de larmes, et s'écrie: "Elle
ne m'a pas apparu." Mais dans la matinée elle entend un appel
intérieur de la Dame. Elle retourne à la Grotte et cette fois
elle voit la Dame qui lui dit: "Vous ne m'avez pas vue ce matin, parce qu'il
y avait des personnes venues ici pour voir la contenance que vous auriez
en ma présence, et qui n'en étaient pas dignes; car ayant
passé la nuit à la Grotte, elles l'ont déshonorée."
La grande peine qu'en a ressentie Bernadette était comme une expiation.
Quel témoignage! La Vierge voit tout dans la Lumière de Dieu.
Et Bernadette va dire à M. le Curé: "La Dame a souri quand
je lui ai dit que vous demandiez un miracle. Quand je lui ai dit de faire
fleurir le rosier, elle a souri de nouveau; mais elle tient à sa
chapelle."
Quinzième apparition: le Jeudi 4 mars 1858 -
dernier jour de la quinzaine
Bernadette descend à la Grotte après la messe, un peu après
7 heures. 20000 personnes assistent au ravissement qui dure une heure et
qui commence au troisième Ave de la seconde dizaine. La Dame se montre
d'abord dans l'excavation de droite. Bernadette sourit et pleure tour à
tour. Puis la voyante doit monter sous le rocher où elle parle longuement
avec la Dame en pleurant. La Dame lui ouvre certes tantôt les heureux
secrets du ciel, tantôt les tristes secrets du monde pécheur.
Seizième apparition: le Jeudi 25 mars 1858 -
en la fête de l'Annonciation
La Dame va s'annoncer. La veille de l'Annonciation Bernadette entend l'appel
de la Vierge. Oh! douce voix! Cette sainte nuit de l'Incarnation sera une
sainte nuit pour Bernadette, une nuit entrecoupée d'Ave Maria. Dès
la pointe de l'aube, peu après 5 heures, elle voudrait courir à
la Grotte, mais une crise d'asthme l'empêche de courir. Oh! bonté
de la Vierge! En descendant vers la Grotte, Bernadette voit la niche
déjà illuminée! La Dame l'attend. Une prévenance
à n'y pas croire. Bernadette ne voit que Marie, mais pas la foule
qui se presse aux abords de la Grotte. Mais laissons Bernadette raconter:
"Quand je fus devant elle, je lui ai demandé pardon d'arriver ainsi
en retard. Toujours bonne pour moi, elle me fit signe de la tête que
je n'avais pas besoin de m'excuser. Alors, je lui exprimai, comme je pus,
toutes mes affections, tous mes respects et le bonheur que j'avais de la
retrouver. Après l'avoir entretenue de tout ce qui me vint au coeur,
je pris mon chapelet. Pendant que j'étais en prière, la
pensée de lui demander son nom s'imposa à mon esprit avec une
persistance qui me faisait oublier toutes les autres pensées; je craignais
de me rendre importune en réitérant une demande toujours
demeurée sans réponse, et cependant quelque chose m'obligeait
à parler. Enfin, d'un mouvement que je ne pus contenir, les paroles
sortirent de mes lèvres et je priai la Dame: "Madame, voulez-vous
avoir la bonté de me dire qui vous êtes?" Comme à mes
précédentes questions la Dame inclina la tête, sourit,
mais ne répondit pas. Je ne sais pourquoi, ce matin-là, je
me sentis plus courageuse et je revins à lui demander la grâce
de me faire connaître son nom. Elle renouvela son sourire et sa gracieuse
salutation et continua de se taire. Alors une troisième fois, les
mains jointes, et tout en me déclarant indigne de la faveur que je
réclamais, je recommençai ma prière. La Dame se tenait
debout au-dessus du rosier. A ma troisième demande, elle prit un air
grave et parut s'humilier. Puis elle joignit les mains, les porta à
son coeur et regarda le ciel. Enfin, les séparant lentement, comme
dans la médaille miraculeuse, et se penchant vers moi, elle me dit,
la voix très douce:
"Qué soy era Immaculada Councepciou."
Mais Marie ne s'en va pas sans exprimer encore son grand désir: "Je
désire une chapelle ici." Il faut que là où a
été l'Immaculée il y ait un autel où Jésus,
son Fils, puisse descendre, car la Vierge ne vient que pour donner Jésus.
Bernadette n'a pas compris ce que voulait dire cette expression "Immaculée
Conception". Mais M. le Curé le saura bien. Aussi va-t-elle tout de
suite chez lui en répétant sans cesse la parole de la Dame.
C'est ainsi que la Vierge s'est révélée d'abord au
prêtre par l'intermédiaire de Bernadette. Et la grande nouvelle
que c'est l'Immaculée, vraiment Elle, qui a visité la terre,
va se répandre partout, par Lourdes, les villages voisins, par la
France et le monde entier. Et c'était partout comme la joie de la
Visitation.
Dix-septième apparition: le Mercredi 7 avril
1858
Quelle joie pascale pour Bernadette de revoir la "Dame", le mercredi de l'octave
de Pâques, de revoir Celle qu'elle connaît maintenant, la Mère
du Christ ressuscité! La Vierge l'avait appelée déjà
dans la soirée du 6 avril. La rumeur s'étant répandue
que la voyante descendrait à la Grotte, 1200 personnes l'attendaient
lorsqu'elle arriva vers 6 heures. Elles voient le ravissement de Bernadette
pendant trois quarts d'heure. C'est ce jour-là, croit-on, que le Dr
Dozous a pu constater pendant un quart d'heure "le miracle du cierge". La
flamme du cierge ne produisait aucune brûlure sur la chair de Bernadette
qui participait pour ainsi dire pendant l'extase à l'impassibilité
d'un corps glorieux.
Dix-huitième apparition: le Vendredi 16 juillet
1858 en la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel
Les adieux sur cette terre. L'appel de la Vierge surprend Bernadette en
prière à l'église paroissiale, vers le soir. Comme la
Grotte a été barricadée par ordre des Autorités,
Bernadette se rend avec sa tante Lucile et quelques amies sur la rive droite
du Gave dans la prairie de la Ribère, en face de la Grotte. Toutes
s'agenouillent et prient. Après quelques instants Bernadette
s'écrie: "Oui, oui, la voilà! La voilà! Elle nous sourit
et nous salue par-dessus les barrières." La Vierge dans la niche
illuminée considère longtemps Bernadette en souriant, incline
la tête et disparaît, laissant son enfant dans une douce paix.
La Vierge s'est montrée "au lieu ordinaire, sans rien me dire... Jamais
je ne l'ai vue aussi belle." Elle L'a revue, le jour de sa mort, le 16 avril
1879 et elle La voit à jamais. Et nous aussi, nous irons La voir un
jour.
Dernière mise à jour : 13 mai 2004
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"Le visage de la voyante, disaient des témoins, devient tout à
coup si clair, si transfiguré, si éclatant, si imprégné
de rayons divins que ce reflet merveilleux que nous apercevons nous donne
la pleine assurance du centre lumineux que nous n'apercevons pas." On voyait
ce jour-là Bernadette comme bouleversée tantôt de joie,
tantôt de crainte; son corps comme mû et attiré en avant,
vers en haut; ses mains jointes, levées, tendues; son visage tout
bleu et émacié; ses yeux agrandis remplis de larmes qui coulaient
sur le visage, des larmes tout autres que celles que nous versons, des larmes
venant d'une douleur pure. Quelle grâce dans les gestes, dans les
inclinations de tête, dans ses saluts, dans ses sourires, dans ses
regards! Ce n'était plus la fille de Louise Soubirous, mais la fille
d'une mère céleste! Bernadette après ces quarante minutes
d'extase, rentrant avec sa mère terrestre lui confia que la Dame "eut
la bonté de lui apprendre mot à mot une prière pour
elle toute seule", prière qu'elle récitera fidèlement
chaque jour de sa vie sans la faire jamais connaître.
Mais il fallait une déception pour faire mûrir les âmes
dans la foi. La Dame ne s'est pas nommée, le rosier n'a pas fleuri
devant la foule, la Dame ne s'est pas montrée aux pèlerins.
Des centaines et des milliers de personnes iront visiter la Grotte les jours
suivants, inaugurant ainsi le pèlerinage de Lourdes. Tous aimeraient
savoir enfin le nom de Celle qui est apparue ici, où se faisaient
déjà de si grands miracles de guérisons. Des aveugles
voient, des paralysés marchent, des mourants se relèvent...
"Je suis l'Immaculée Conception."